Avant-propos
Mon enfance fleure bon l’encre violette dans l’encrier de faïence blanche encastré au coin de mon pupitre d’écolier.
Dans une petite ville où la Seine était encore Inférieure, j’habitais à l’école des filles dont ma mère était la directrice. Je rejoignais à pied, avec mes camarades, celle des garçons distante d’environ 500 mètres. Sur le trajet, nous effectuions une halte quasi-quotidienne à l’épicerie pour faire emplette de carambars, roudoudous et autres mistrals gagnants, tous ces « bombecs fabuleux » chantés par Renaud.
Mon école ne ressemblait à aucune autre. A l’origine, c’était un confortable hôtel, « Le Continental », fréquenté par la clientèle du casino et des thermes voisins. Durant la seconde guerre mondiale, il fut réquisitionné comme hôpital. Plus récemment, ce devint une ménagerie de fortune d’où s’échappa même une panthère semant une certaine panique, avant de retrouver, aujourd’hui, sa vocation hôtelière primitive. A nos yeux de gamins, sa façade offrait une certaine majesté avec un large escalier ouvrant sur un perron.
Près de 50 ans plus tard, je n’ai oublié aucun de mes valeureux enseignants ; c’est l’occasion de leur rendre un modeste hommage : Madame Sole-Tourette qui m’apprit à lire au cours préparatoire, Mademoiselle Persègol et son accent chantant des gorges du Tarn, au cours élémentaire 1ère année. Je passais directement au cours moyen 1ère année avec une autre méridionale, la jolie Madame Ricard. Nous en étions tous un peu amoureux et je me souviens d’un jour de tristesse de la voir pleurer suite à l’éloignement de son mari muté dans le sud. A sa douceur, succéda au CM2, la sévérité de Monsieur Chauvet teintée cependant d’une grande sensibilité. J’ai encore en mémoire, ses larmes lorsqu’après avoir été victime d’un grave accident de scooter, il vit défiler ses élèves dans sa chambre de clinique. L’administration tatillonne, après m’avoir dispensé de CE2, m’interdit d’entrer en sixième prétextant mon trop jeune âge…mes parents décidèrent donc de m’aguerrir auprès des adolescents du certificat d’études. Est-ce la découverte trop précoce du pied à coulisse et de la varlope qui explique mon manque d’attrait pour le bricolage ? Bien plus sérieusement, je conserve une respectueuse reconnaissance pour mon maître Pierre Marrassé. Au-delà de cette année merveilleuse, il devint un compagnon de route sportive au hand-ball et tennis et l’ami de 40 ans qu’il demeure toujours. Vint le temps du collège avec un père qui, chaque jour, se métamorphosait en professeur mais cela, je l’évoquerai dans une autre rubrique. Je fais donc partie de ceux, de plus en plus rares ou vieillissants, qui ont appris à écrire au porte-plume, ont connu la petite boule sur le majeur, les « pâtés » sur le cahier, le buvard. J’adorais la plume Sergent-Major pour ce qu’on n’appelait pas encore son design. Son doux crissement sur le papier rythmait le silence de la création. Je me délectais de la beauté du tracé avec les pleins et les déliés.
Ces sensations s’effacèrent avec l’usage du stylo à bille. Aujourd’hui, le clavier de l’ordinateur a formaté l’écriture qui s’est faite scripte. Si je m’attarde, avec un brin de nostalgie, sur ce temps de l’insouciance, c’est que je suis persuadé d’y avoir puisé le goût du savoir et de la pensée, l’intérêt pour la lecture et l’écriture, le plaisir des images et des sons, la curiosité. Cela devrait transparaître dans ce blog et ses rubriques d’hier et d’aujourd’hui.
P.S : Ces rubriques ou catégories s’enrichissent de nouveaux billets, tout naturellement au fil des semaines et des mois. Aussi, certains articles anciens n’apparaissent plus dans la page de garde des catégories. Vous pouvez les retrouver en fouillant dans les archives. Bonne lecture.
Ah! ce que l’écriture est capable d’évoquer à celui qui la lit ! Et la tienne a de ces pouvoirs qui ne laissent pas la mémoire inactivée.
Je me souviens … Pérec.
Génération de l’école publique, poussière des parquets arrosés avec un entonnoir avant d’être balayés, poussière de la craie tombée le long des tableaux, chaleur des poëles à bois, odeur de l’encre d’imprimerie qui colle à la feuille de papier,bourdonnement du projecteur de cinéma 16 mm le samedi après midi…
L’école remplissait notre enfance.
Bravo.
Malgré le temps qui s’envole, il n’en est pas moins vrai que les souvenirs d’école ne s’oublient jamais..!!
L’odeur de la craie, l’encre violette, des cartables en cuir, l’odeur des crayons taillés..!!
Entends-tu encore tinter la cloche..?
Bravo pour ce blog rempli de douceur
Bravo pour ce texte qui fleure bon l’encre violette, les parquets encaustiqués, un autre monde, celui de la nostalgie, de notre enfance et de tous ces petits riens qui nous ont fait grandir…
La presentation est belle ,je feuilleterai le livre plus tard
souvenir souvenir quand tu nous tiens bises
Quelle plume! Que de chaleur, de douceur accompagnées d une note d humour !!
Je lisais le texte (trop court ), j étais dans le recit et en même temps dans ma classe des années 60 !!
Quel plaisir de revivre ces moments qui sont dans une case grâce à des gens comme vous qui font rouvrir les tiroirs a souvenirs
Je n ai qu un mot: BRAVO d’ admiration
Je vis tous mes jours à cette heure de l’école Primaire de la Place Marceau à DRANCY. J’ai encore autour de moi mes Cahiers du jour, mon plumier en bois à 2 étages, Mon CERTIFICAT D’ETUDES – Année 1954/1955 avec Madame CHASSOT à laquelle je pense souvent. Je lui dois tout, mon amour des livres, ma passion d’écrire, l’amour de l’orthographe et des mots. Je vous trouve là, éberluée de bonheur et d’apaisement .. d’aucun rêvent encore ! Les dictées d’A.FRANCE que j’abordais le coeur battant espèrant faire encore 0 fte ! l’Hist./Géo regardée une dernière fois à la récré avant que, 1° de la classe, désignée je n’aille sonner la fin et la rentrée en rang devant le perron de 5 marches qui avait aussi vu ma mère entrer ! çà faisait : tuing .. tuing .. TUIN UIN ING .. Un mélange de cloche et d’électricité .. Un frisson m’oblige à vous quitter ..! MM.
Merci pour ces quelques lignes empreintes d’une nostalgie positive.
Hasard du calendrier, incorrigible rêveur, demain je défilerai pour la défense de toutes ces valeurs véhiculées par l’école publique.
A travers ce « blog »(quel drôle de mot!), renaissent le plaisir de l’écriture, du mot juste, le goût d’observer et de découvrir, toutes ces choses que ,patiemment, nous inculquèrent nos valeureux professeurs.
Bonjour,
ça va peut-être te surprendre, mais nous nos connaissons très bien, en effet, j’étais élève de ton père en cours complémentaires dans les années 49/50, il était prof de français et de dessin (peinture). le directeur était M. André Bertrand, mes camarades de classe: André Mathé, sa mère était prof d’anglais( pour les garçons) et ta mère pour les filles, il y avaient aussi Garby, le fils du pharmacien, Guy Ely de la Ruche, tué au Service militaire, François Vicaire de la Dépêche etc.
Je me souviens que nous étions un peu méchant car nous avions surnommé ton père « Zozo » et nous avions fait sur lui une chanson que tu dois te rappeler.
Ce sont de très bons souvenirs.
J’ai toujours son livre qu’il m’avait dédicacé durant mon passage à Forges les eaux.
A plus, bien amicalement.
Ce sont presque des heureuses retrouvailles, je dis presque car ton camarade de classe était mon frère aîné Jean-Pierre.
Bien évidemment, tous les noms évoqués m’interpellent. Monsieur Bertrand n’était plus à mon époque directeur mais je l’ai bien connu à sa retraite ainsi que son gendre Pierre Marrassé évoqué dans mon avant-propos. Madame Mathé m’apprit mes premiers rudiments d’anglais; son fils André fut un ami très proche de mon frère, malheureusement il est décédé il y a une bonne dizaine d’années.
François Vicaire a succédé à son père à la direction du journal local La Dépêche du Pays de Bray.
Je te communiquerai mon mail personnel par ailleurs et je ferai part de ton commentaire à mon frère.
Bien amicalement
En effet, il y a confusion sur les prénoms, tu m’apprends une bien triste nouvelle concernant André Mathé, c’était un bon copain d’école, j’ai essayé quand j’étais à Saclay de le revoir, ayant su par ton père qu’il travaillait à Technicatom, mais ça ne c’est pas fait.
Le bonjour à ton frère qui en effet, doit se rappeler de moi, nous devions avoir un an de différence.
Bein amicalement.
Jacques MDD.