Ici la route du Tour de France 1953 (1)
Jouant les boomers invétérés du « c’était mieux avant » (dans le domaine du cyclisme), comme chaque année, au tournant de l’été, je vous retrouve pour vous conter les Tours de France de mon enfance, ceux dont j’écoutais les reportages sur l’antique TSF familiale, ceux dont je découvrais les péripéties à travers la lecture des précieux magazines en bistre et en vert.
Pour moi, ce sera un Tour de France à l’encre violette
Aujourd’hui, malgré les médias omniprésents, on ne reconnaît plus les coureurs casqués, lunettés, leurs maillots, cuissards et chaussures surchargés d’inscriptions publicitaires. Quand on peut les voir passer !… Des arrêtés préfectoraux interdisent souvent aux voitures l’accès aux cols 48 ou 72 heures avant.
Les oreillettes en liaison avec les voitures des directions techniques remplacent le fameux sens tactique des coureurs. Les cardiofréquencemètres, les capteurs de watts et autres gadgets technologiques, contrôlant la gestion de l’effort, ont modifié la physionomie des courses, privilégiant désormais une moins glorieuse certitude du sport cycliste, au nom d’une rentabilisation maximale.
Les passages à niveau n’existent pourtant quasiment plus, cependant, on n’a jamais vu passer autant de « trains », comprenez des convois d’équipiers en file indienne autour de leur leader !
La traversée des villes et même des villages est devenue dangereuse avec la multiplication des ronds-points giratoires, terre-pleins centraux, chicanes, séparateurs de chaussée, dos d’ânes, tous ces artifices imaginés pour freiner la progression des automobilistes.
Curieuse ironie du « progrès », en revanche, les organisateurs dénichent des passages en gravel, des « strade bianche », des chemins de vignes, pour redonner un souffle d’épopée à leur épreuve.
Allez, vous avez compris ma nostalgie, le Tour de France 1953 vient chez vous !
Éditorial du brillant journaliste Maurice Vidal dans le Miroir-Sprint d’avant-Tour :
« Le Tour de France fête, cette année, son cinquantenaire. Et pourtant, il n’aura connu que quarante étés. Quel est donc cet être étrange, né en 1903, et qui n’a que quarante ans ? Peut-être un jour, nous aussi, grâce à l’hibernation, pourrons-nous semer quelques années par-ci, par-là, afin d’en vivre de plus belles. Mais ces dix étés du Tour de France, où sont-ils passés ? Nombreux, parmi les hommes qui se passionneront du 3 au 26 juillet, sont ceux qui peuvent fournir la réponse. Car ils sont nombreux ceux qui ont perdu ces dix étés en même temps que le Tour de France. La réponse est là, lumineusement tragique : quand il n’y a pas de Tour de France, c’est que les hommes sont occupés ailleurs. Pendant ces dix années, au lieu de venir sur le bord des routes, dans le soleil et la bonne poussière des jours de fête, ils creusaient des trous, ils se terraient, ils se battaient contre d’autres hommes. De spectateurs, ils devenaient acteurs. Tous n’en mourraient point, mais tous étaient frappés. Alors, puisqu’il est clair que le Tour de France ne vit que lorsque les hommes ne meurent pas, de tout cœur, de toutes les forces que nous possédons, souhaitons-lui longue vie. Qu’il ait lieu tous les étés et qu’il dure longtemps ! Et qu’il soit le rendez-vous de tous les hommes de bonne volonté, ceux dont on a dit qu’ils avaient droit à la paix sur la terre ! »
Le truculent romancier René Fallet, né à Villeneuve-Saint-Georges comme le Tour de France, n’écrivait pas autre chose dans sa délicieuse ode au Vélo :
« Quand le Tour de France n’a pas lieu, c’est comme par hasard, le tour des catastrophes. Qu’on en juge : il ne manque au palmarès de cette épreuve que quelques lignes, et elles correspondent fâcheusement aux années noires des deux dernières guerres mondiales … Je ne vois pas en quoi rayer de la planète la course cycliste, ou le serment d’amour, ou la cueillette des champignons, empêchera les bûchers de brûler, les fours à gaz de s’allumer … En fin de compte, dès qu’on ne numérote plus les dossards, on numérote les abattis. »
Il y a 70 ans, la Direction du Tour était déjà confrontée à des impératifs commerciaux évoqués par André Chaillot dans Miroir-Sprint :
« Les organisateurs, soumis à des impératifs financiers rigoureux et surtout obnubilés par le souci d’assurer la pérennité de la grande course sont obligés chaque année de rechercher la formule propre à leur assurer à la fois le triple succès financier, populaire et sportif dont le Tour, ce géant plus vorace d’un an à l’autre, a besoin. Ce faisant, ils doivent parfois « composer » avec le mot sport dans tout ce qu’il a de rigide aux yeux des puristes et « adapter » la formule de la course aux exigences de l’actualité.
Depuis 1903 jusqu’à ce qu’il disparaisse, Henri Desgrange n’a jamais cessé chaque nouvelle année de polir son œuvre. Mais avant tout, il s’est efforcé en fonction des constatations faites en cours de chaque édition de la grande boucle et des réactions de l’opinion publique au terme de celle-ci, de rechercher la formule la meilleure, compte tenu en premier lieu des intérêts du journal organisateur dont il était le directeur. Jacques Goddet, continuateur d’Henri Desgrange, n’a fait que s’inspirer des principes de son prédécesseur. Non pas par esprit routinier mais simplement parce que le Tour de France pour conserver son immense popularité, doit chaque année offrir un visage nouveau à ses innombrables admirateurs.
On verra que le Tour 1953 ne ressemble en rien à celui de 1952. Et pourtant, Jacques Goddet démontrait l’année dernière avec arguments péremptoires à l’appui, que la formule de 1952 offrait un maximum d’avantages pour un minimum d’inconvénients. Cette année, avec des arguments tout aussi péremptoires, le même Jacques Goddet disséquant le profil et les caractéristiques de la course expose un point de vue diamétralement opposé à celui de l’année précédente en se déclarant, en conclusion, parfaitement satisfait de ce que l’on peut considérer comme son œuvre personnelle.
Les mauvais esprits verront là un changement de doctrine condamnable. Telle n’est pas notre opinion. Le fils spirituel du non moins spirituel « Père du Tour » n’a fait en réalité qu’adapter la formule de la course aux exigences de l’heure. Exigences dictées par l’expérience de l’année précédente.
C’est ainsi que le Tour 1952 a souffert de la supériorité trop grande d’un homme : Fausto Coppi pour ne pas le nommer. Il est notoire que dès qu’il eut pris la tête, le champion italien, hors de portée de tous ses rivaux, porta un coup sensible à l’intérêt de l’épreuve, intérêt déjà amoindri par les forfaits à la veille du départ de vedettes internationales confirmées comme le Suisse Koblet et notre national Bobet. Or, qui dit désaffection du public pour une épreuve de l’importance du Tour, dit obligatoirement baisse de tirage du journal organisateur et en conséquence possibilité de déséquilibre du budget particulièrement énorme de la grande course.
On ne peut donc en vouloir à un organisateur, directeur de journal de surcroît, de rechercher les moyens d’obvier à une baisse de tirage de son journal -avec tout ce que cela implique- en étudiant une formule propre, selon lui, à revaloriser son épreuve. Henri Desgrange lui-même n’a jamais procédé autrement. Et, si au cours de sa longue histoire, le Tour de France a été successivement disputé par points, puis au temps, par équipe de marques puis par équipes nationales et régionales, qu’il fut un temps favorable aux grimpeurs, puis défavorable à ceux-ci, il ne faut pas chercher des raisons autres que celles exposées plus haut. À savoir le succès populaire de la course, succès conditionnant une forte vente du journal organisateur.
Donc opération strictement mercantile ? Pas nécessairement puisque en définitive et quelle que soit la formule adoptée, c’est toujours un très grand champion qui triomphe tant il est vrai et démontré qu’un coureur répondant à l’appellation de « champion » doit se plier à quelque formule de course que ce soit…
… Humaniser le Tour, tel a été, paraît-il, le souci des organisateurs. On nous permettra de douter de la pureté de leurs intentions. L’histoire de la grande boucle étant là pour prouver que le mot humanitaire est une nouveauté dans le langage des habituels thuriféraires « maison » de la grande épreuve.
« L’humanisation » en question porte : A) sur le raccourcissement général des étapes, B) sur l’abandon de certains cols considérés comme obstacles « monstrueux », C) sur la diminution des étapes contre la montre, une au lieu de deux, D) sur un nombre inférieur d’étapes à 1952 (vingt-deux au lieu de vingt-trois). J’ajouterai la suppression des bonifications allouées aux sommets des cols.
Il s’est agi, selon l’aveu même des organisateurs « d’éviter que le vainqueur se dégage trop tôt et creuse de trop gros écarts ».
Autre innovation afin d’accroître l’intérêt de l’épreuve, apparaît le « maillot vert » pour récompenser le premier du classement par points et sa régularité, en somme les sprinters. Il doit sa couleur (l’écologie n’existait pas !) à son parrain publicitaire La Belle Jardinière, une chaîne de magasins de confection (aucune activité liée au jardinage), florissante au XIXème siècle, qui fournit des uniformes pour certains établissements scolaires et vendit des vêtements militaires aux officiers français et alliés pendant la Première Guerre mondiale. Benjamin Biolay n’a donc pas tort quand il chante « Sur le Pont-Neuf y a que des vieux » !!!
Digression : fut-ce un dégât collatéral de mai 68, cette année-là, le nouveau sponsor du trophée, un fabricant de limonades, imposa la couleur rouge ! On ne détruit pas les tuniques mythiques comme ça (sinon les mites !), le maillot reverdit dès l’année suivante.
Dans les années 1950, les délais d’impression des journaux étaient longs. Conséquence : Miroir-Sprint, impatient sans doute de devancer son concurrent But et Club Miroir des Sports, affiche en couverture de son numéro de présentation, Hugo Koblet, Louison Bobet et Fausto Coppi comme grands favoris du Tour.
Or, le campionissimo Fausto Coppi, brillant vainqueur de l’édition précédente et tout récemment victorieux du Giro 1953, est très réticent pour une nouvelle participation à la grande boucle.
« Lorsqu’on me parle du Tour de France 1953 et ce depuis plusieurs mois il est bien rare qu’on ne me considère pas comme un garçon qui n’a qu’à prendre le départ pour se retrouver en vainqueur au Parc des Princes. C’est sans doute un grand honneur qu’on me fait là en imaginant qu’il me suffit d’apparaître et de pédaler pour que toutes les chances de me de me concurrents s’évanouissent. Hélas ! ce n’est pas aussi simple que cela… Tout d’abord, on paraît oublier que je n’ai plus vingt ans. Ni vingt-cinq, ni trente… Les années pèsent dans mes jambes aussi bien que dans celles de mes adversaires. La jeunesse s’enfuit et ne se remplace pas. J’aurai bientôt trente-quatre ans. Pour un routier, c’est un âge où l’on commence à songer sérieusement à la retraite. L’enthousiasme et l’ambition des jeunes années sont estompés. Il reste le désir de ne pas décevoir et le plaisir de surmonter les obstacles. Mais ces derniers deviennent de plus en plus difficiles. Les efforts exige de plus en plus de dépense d’énergie et la récupération, ce don de la jeunesse, se fait de moins en moins rapidement. Pédaler devient un travail qui ne s’accomplit pas tout à fait dans la joie, mais bien souvent dans une souffrance qu’il faut cacher… »
… Je ne me sens pas capable de prétendre que j’ai autant de chances de gagner le Tour que j’en avais l’an dernier. D’abord, parce que je suis moins fort qu’il y a un an. Ce n’est pas une simple impression mais une certitude. Je sais bien, moi, le mal que j’ai eu à décramponner Hugo Koblet dans le Tour d’Italie. Il m’a fallu vraiment faire appel à toute mon énergie pour le lâcher dans le Stelvio et, si il n’y avait pas eu sur le parcours une montée aussi pénible j’aurais été vraisemblablement battu. Or, Koblet sera là, dans le Tour. Avec un moral de fer et bien décidé à ne me faire aucune politesse… »
Comme les journalistes d’aujourd’hui se complaisent à pérorer qu’aucun sportif ne doit être au-dessus de l’institution (!), le Miroir des Sports s’aventure dans des considérations « philosophico-historico-scientifiques » :
« Les champions passent : le sport demeure. C’est peut-être un grand sujet de méditation que cette fugacité des êtres dans la pérennité de l’institution. Que le Tour se dispute avec ou sans Coppi, avec ou sans Koblet, il vit depuis cinquante ans d’une existence autonome, mais aussi complexe que celle d’un organisme dans lequel des milliards de cellules ont leur vie indépendante et pourtant étroitement liée à celle de l’ensemble. La personnalité du Tour est faite en grande partie de la personnalité des champions qui y participent. Il n’y a pas moins d’utilité à étudier le caractère des champions que l’histoire de la course si l’on veut pouvoir porter un jugement objectif sur cette dernière. Que pensait Henri Pélissier de Bottechia à la veille du Tour 1925 qu’il renonça à disputer ? Quels étaient les sentiments de Sylvère Maes, premier engagé du Tour de France 1947 –qu’il ne put courir- à l’égard de Vietto son adversaire de 1939 quelques jours avant le départ de ce Tour de reprise ? Nous ne savons pas ou mal. Tous appartiennent pourtant à ce qu’on a pu nommer la « grande Légende du Tour de France ». Coppi et Bobet sont des maillons de la chaîne qui, depuis 1903, unit tous les cyclistes et les lie à une œuvre qui les dépasse et qui est le Tour de France. »
Coppi ne veut pas courir aux côtés de Bartali, âgé de 39 ans tout de même, qui lui mène, jusqu’au sein de la squadra, une perpétuelle guerre des nerfs. Et les farouches supporters de Gino ne lui pardonneraient jamais de ne pas gagner le Tour après avoir interdit à Bartali de le courir. Donc Fausto renonce.
Le Belge Stan Ockers, second du Tour l’année précédente, a purement et simplement été mis à la retraite par sa fédération qui tient le raisonnement suivant : « Évidemment, Stan est un bon coureur qui peut encore faire deuxième ou troisième du Tour de France. Mais nous connaissons son plafond et, par conséquent, il ne nous est d’aucune utilité pour l’avenir ».
Stan écrira l’avenir à sa façon en devenant champion du monde en Italie, sur le circuit de Frascati, trois ans plus tard.
Le Suisse Ferdi Kubler, vainqueur du Tour 1950, renonce à s’intégrer à l’équipe suisse. S’il estime son compatriote Koblet et le tient en dehors du sport pour un parfait ami, il mène contre lui, depuis des années, une guerre de prestige faite de lutte puis de renoncement. Le plus souvent, il ne participe pas aux grandes épreuves où se trouve déjà Hugo.
En Espagne, Bernardo Ruiz est laissé au pays parce qu’il entendait jeter l’exclusive contre certains des sélectionnés.
La France connaît aussi sa « petite affaire » avec Robic en fréquent conflit avec son rival breton Louison Bobet. Mais Biquet « tête de cuir » sera finalement au départ de Strasbourg … au sein de l’équipe de l’Ouest. Le journaliste Albert Baker d’Isy écrit dans Miroir-Sprint : « Sur sa forme actuelle comme sur son passé, Robic avait sa place théorique dans cette équipe de France. Qu’elle lui soit refusée pour des raisons d’incompatibilité d’humeur, c’est admissible, mais il est déplorable de voir le meilleur Français du Tour 52 devenir l’ennemi public des sélectionnés tricolores… » Par contre, son constructeur Marcel Colomb le libère et, peu avant minuit la veille du départ, Robic signe un accord le liant officiellement à la firme dijonnaise Terrot.
Après une dernière sortie en vallée de Chevreuse, Louison Bobet, qui souffre d’une induration récurrente à la selle, donne enfin son accord pour prendre le départ de Strasbourg. Raphaël Geminiani, Lucien Teisseire, Antonin Rolland, Jean Le Guilly, Raoul Rémy, Nello Lauredi, Bernard Gauthier, Jean Dotto et Adolphe Deledda complètent une sélection hétéroclite au vu du caractère et du manque d’altruisme de chacun. Bobet devra se montrer convaincant pour postuler au statut de leader unique.
Deux jeunes coureurs prometteurs vont faire leurs grands débuts : le Luxembourgeois Charly Gaul et le Landais André Darrigade qui écriront bientôt quelques belles pages de la légende du Tour.
J’aime consulter la liste des concurrents, en particulier les équipes françaises dites régionales. Cela n’a plus de sens aujourd’hui à notre époque de la mondialisation, des jets et des TGV, mais en ce temps-là, ces coureurs valeureux étaient les représentants d’une certaine France rurale, ce qui leur valait une belle popularité et parfois un surnom. Certains effectuèrent une brillante carrière, ainsi le Montluçonnais Roger Walkowiak qui remporta le Tour de France 1956, l’Ardéchois René Privat dit Néné la Châtaigne vainqueur d’un Milan-San Remo, le Lyonnais Jean Forestier vainqueur d’un Paris-Roubaix et d’un Tour des Flandres.
Ils sont certes rares mais certains sont, à ce jour, encore en vie et sont volontiers sollicités par les journalistes pour apporter leurs témoignages. Ainsi, le Lorrain Gilbert Bauvin (second du Tour 1956) soufflera ses 96 bougies le 4 août prochain, Jean Forestier fêtera ses 93 ans en octobre. Le championnat de France sur route 1953, disputé une semaine avant le départ du Tour, vit la victoire de l’Auvergnat Raphaël Geminiani, 98 ans le 12 juin, devant Antonin Rolland, 99 ans en septembre prochain, et leur leader de l’équipe de France Louison Bobet.
Puisqu’il est question d’anniversaire, les organisateurs ont fêté dignement celui du Tour de France en reconstituant le départ du premier en 1903 à Montgeron. Une plaque commémorative a même été apposée à la façade du café, le « Réveil Matin » en présence du vainqueur Maurice Garin, encore bon pied bon œil. J’ai eu l’occasion d’évoquer son souvenir dans un récent billet*, lors de la traversée de son village natal, dans le Val d’Aoste, au retour d’un séjour en Italie.
Le Tour 1953 part de Strasbourg le vendredi 3 juillet, on ne s’embarrassait pas à l’époque de contraintes de calendrier imposées par la télévision, et pour cause. Lors de la 1ère étape Strasbourg-Metz, les 120 coureurs traversent l’Alsace et la Lorraine avec une petite incursion en Sarre sous occupation française de 1946 au 1er janvier 1957.
Il pleuvait sans cesse sur Brest dans la chanson de Prévert, il en fut de même à l’Est si j’en crois Félix Lévitan dans son roman du Tour intitulé L’enfant qui a grandi (il s’agit du Tour bien sûr) qu’il écrit sous forme d’une correspondance avec son créateur Henri Desgrange :
« Le ciel de Strasbourg était noir. Il avait plu une partie de la nuit, plu une partie de l’aube. C’était triste à mourir. L’orage cessa, pourtant, sur le coup de neuf heures. Moins de soixante minutes plus tard, c’était le déluge.
Le protocole en a souffert. Rien qui ne soit conforme à vos vœux secrets : c’est une présentation dans les règles, une mise en place des équipes dans un cortège bien ordonné et qui n’a plus aucune commune mesure –je m’excuse de cette brutalité affectueuse- avec votre « lâcher tout » d’autrefois à l’aimable désordre.
Dans la capitale de l’Europe –c’est de Strasbourg qu’il s’agit, mais ce n’est pas ici le lieu de dresser l’historique des événements politiques qui ont élevé cette grande ville dans la hiérarchie mondiale- dans la capitale de l’Europe, donc, l’homme a le goût du décorum. Nous allions nous distinguer, soulever l’admiration des foules…
En fait, nous n’avons cherché lâchement qu’à nous abriter. Après quoi, l’enthousiasme était plutôt rafraîchi et nos malheureux coureurs trempés jusqu’aux os. C’est pitoyable un coureur cycliste tout mouillé. Pitoyable et stupide, surtout lorsqu’il est à pied. On s’étonne qu’il ait les jambes nues, une petite casquette rikiki dont la visière mollit et se tord, et, sur le dos, des bouts d’imperméables transparents sortis tout droit du rayon garçonnets.
Jacques Goddet –seul- a été héroïque. Il a affronté le cataclysme stoïquement, tête nue, la moustache hérissée, le visage ruisselant…
Quelle étape ! Piero Farné, un confrère italien que vous n’avez pas connu avant-guerre et qui vous eût séduit par ses manières distinguées, a traduit sa pensée dans le Corriere Lombardo : « Epico. » Quelque chose comme épique, grand, surnaturel, étonnant ! Il en avait plein la bouche : « Epico, mon ami, Epico… » Merveilleux enthousiasme des hommes ! C’est vrai, au fond, c’était épique… Le tonnerre roulait ses batteries dans le fond de la campagne ruisselante, le ciel était sombre comme celui d’Elseneur, les éclairs jetaient leurs lueurs mauves sur l’horizon blafard… Épique, certes, la fugue d’une poignée de fous insouciants du sol glissant et des descentes dangereuses… »
En effet, nos courageux coursiers nous ont offert une étape animée (39,660 km/h de moyenne) malgré les trombes d’eau. Après de nombreuses tentatives dont une du grand favori Hugo Koblet, 8 hommes s’échappent au 62ème km : les Hollandais Wagtmans et Roks, le Suisse Schaer, deux régionaux de l’équipe Nord-Est-Centre Bauvin (l’air de la Lorraine ?) et Anzile, ainsi que trois Tricolores Geminiani, Nello Lauredi et Raoul Rémy. Ils sont rejoints en territoire sarrois par 17 autres coureurs, parmi lesquels Robic et le fantasque Alsacien Hassenforder. Thijs Rocks se détache sous l’orage dan la côte de Feldsberg mais un passage à niveau fermé à Teterchen, à 36 km de l’arrivée, le contraint à accepter le retour de Schaer, Lauredi et Wagtmans.
Au sprint, sur le boulevard Poincaré à Metz, le Suisse Fritz Schaer se montre le plus rapide et revêt le premier maillot jaune. Le deuxième groupe d’échappés, avec en son sein Jean Robic, termine à 3 minutes et 13 secondes. Le gros du peloton concède 9 minutes et 50 secondes. Les favoris Koblet, Bartali et Bobet n’ont-ils pas commis une erreur en lâchant déjà 6 minutes à l’excellent grimpeur qu’est Robic, vainqueur du Tour 1947 ?
La deuxième étape qui mène les coureurs de Metz à Liège via le Luxembourg possède un faux-air de la classique ardennaise, Liège-Bastogne-Liège, avec ses bosses en fin de parcours. Le temps est tout de même moins abominable que la veille. Le peloton, déjà amputé d’une unité, suite à l’élimination du Suisse Croci-Torti arrivé à Metz après l’expiration des délais, enregistre l’abandon, dès le 50ème kilomètre, du Provençal Jean Dotto, le « vigneron de Cabasse », sur lequel l’équipe de France fondait de réels espoirs en raison de ses qualités de grimpeur.
L’échappée décisive se dessine à la frontière luxemburgo-belge avec la constitution d’un quatuor : Hassenforder, Desbats et … deux vieilles connaissances de la veille, le maillot jaune Fritz Schaer et le Hollandais Wout Wagtmans.
Hassenforder, trop prodigue en efforts, est lâché dans la rude côte de Stavelot, bientôt imité par le Bordelais Robert Desbats (au vrai prénom de Jean).
On prend les mêmes et on recommence : sur le quai des Ardennes à Liège, comme la veille, le Suisse Fritz Schaer règle facilement au sprint Wagtmans et consolide son maillot jaune.
Dans la côte de Mont, à 25 km de l’arrivée, un petit groupe de favoris s’est constitué. Gino Bartali termine troisième à 47 secondes devant Koblet, Magni, Robic, Close, Astrua, Bobet, les Hollandais Wim Van Est et Gerrit Voorting, et le Lorrain Gilbert Bauvin.
Derrière, c’est la débandade et le gros du peloton avec Geminiani accuse un retard de 5 minutes et 15 secondes.
Quels sont ces coureurs suisses qui n’arrivent jamais à l’heure ? Après Croci-Torti, ce sont Chevalley et Melli qui finissent hors délais et sont donc éliminés.
Au classement général, Jean Robic est le premier Français ex-aequo avec le « régional » du Nord-Est-Centre, Ugo Anzile, un Italien originaire de la région du Frioul-Vénétie Julienne, émigré en Lorraine, et bientôt naturalisé français en 1954. Il devint à la fin de sa carrière un homme d’affaires avisé en créant, dans la banlieue messine, l’entreprise de carrelages Ugo Anzile Diffusion, toujours florissante aujourd’hui sous l’enseigne familiale Anzile Carrelage.
Ils ne sont plus que 115 au départ de la troisième étape Liège-Lille, 221 kilomètres, avec un final pavé « à la Paris-Roubaix ».
Est-ce le soleil enfin de mise et le proche retour en France, trois Français, le Tricolore Bernard Gauthier et les régionaux André Darrigade et Roger Hassenforder lancent les hostilités presque immédiatement après le départ de Liège. Ils sont rejoints avant Bruxelles par une douzaine d’hommes, d’abord le Luxembourgeois Kirchen, le Belge Alex Close, le Hollandais Voorting, le Tricolore Antonin Rolland, le Parisien Stanislas Bober et Émile Baffert de l’équipe du Sud-Est, puis l’Espagnol Serra, le Belge Raymond Impanis, le Néerlandais Wim Van Est, le Suisse Huber, le tout jeune Luxembourgeois Charly Gaul, le Lyonnais Jean Forestier et deux autres Franciliens Jacques Renaud et P’tit Louis Caput.
Un groupe très international pour traverser la capitale de l’Europe.
Jacques Brel, qui aimait le vélo, ne faisait pas encore « bruxeller » Bruxelles :
« Place de Brouckère on voyait des vitrines
Avec des hommes, des femmes en crinoline
Place de Brouckère on voyait l’omnibus
Avec des femmes, des messieurs en gibus »
Place de Brouckère, on voyait aussi les coureurs du Tour de France se ravitailler..
Amené récemment à effectuer plusieurs séjours dans la capitale de l’Europe, je remarque qu’à l’époque se dressait au milieu de la place, l’élégante fontaine Anspach remontée en 1981 au bout des bassins près de l’église Sainte-Catherine. L’allure est rapide (un quart d’heure d’avance sur l’horaire) et les coursiers n’ont pas le loisir de s’attarder devant la sculpture allégorique de la sirène.
À la frontière, les échappés possèdent sept minutes d’avance sur le peloton.
Bourghelles, Cysoing, Sainghin-en-Mélantois, des localités qui sentent bon « l’enfer du Nord » et qui inspirent Bober le Parisien au maillot rouge et bleu. Il déclenche une attaque tranchante à une trentaine de kilomètres de l’arrivée et, protégé par ses équipiers Caput et Renaud, termine brillamment en solitaire sur le circuit de la Foire à Lille.
Le peloton est réglé par Koblet à 8 minutes et dix secondes. Il en aurait fallu trois de plus pour que Jacques Renaud voie la vie en … jaune. Il est décédé en 2020, il aurait été centenaire cette année, preuve que le vélo conserve … pas toujours, car un encart dans Miroir-Sprint rend hommage au Belge Gaston Rebry, surnommé le « bouledogue de la route », vainqueur de Paris-Roubaix à trois reprises (en 1934, il avait profité du déclassement de Roger Lapébie qui avait terminé avec un vélo emprunté à un spectateur !), qui vient de mourir à 48 ans.
Parenthèse tennistique**, en feuilletant le magazine, je retrouve avec émotion une photographie de la paire australienne Lewis Hoad et Ken Rosewall victorieuse, à moins de vingt ans, du tournoi de double de Wimbledon.
Retour sur le vainqueur du jour Stanislas Bober auquel Miroir-Sprint avait consacré un article dans son numéro de présentation du Tour. « Stani » pour ses supporters, de parents Polonais, est un vrai titi parisien : « Il a en effet deux patries, Nanterre où il est né en mars 1930, et le Petit-Colombes où il habite depuis vingt-trois ans. Le môme a cavalé dans tous les coins de sa banlieue du temps où il allait apprendre à nager au pont de Bezons, roulait sur son vieux vélo pour aller travailler à Levallois, fonçait jouer au foot sous les couleurs de l’Association Fraternelle de La Garenne-Colombes ou mettait les gants au gymnase Copin. Sa silhouette de blondinet aux yeux bleus est tellement familière et il est resté si gentil garçon dans sa gloire naissante (il vient de remporter en mai le Circuit de l’Indre et animer les Boucles de la Seine, ndlr) que ses partisans sont légion du pont d’Argenteuil à l’île de la Grande Jatte. » Avec ses gains du Tour, il est prêt à démolir la baraque en planches où il habite pour reconstruire la sienne en dur.
Lundi 6 juillet, le Tour de France arrive à Dieppe. J’y étais avec mon cher père, je m’en souviens encore bien, des images prises par lui avec sa caméra 9,5 mm en attestent. J’aurais bien cru que les vacances scolaires ne débutaient que le 14 juillet, à moins que, maîtrisant bien la lecture à l’issue de mon année de Cours Préparatoire, mon professeur de père jugea peut-être que, pour une fois, le Tour de France, dans le département de la Seine-(alors)Inférieure, primait ! Étonnant non ?
Les coureurs escaladent la côte de Doullens qui constitua pendant longtemps la première difficulté de Paris-Roubaix. Combien de fois, n’ai-je pas entendu mon père, raconter que dans sa jeunesse picarde, ils retournaient leur roue arrière en bas de la côte pour changer de denture, en l’absence de dérailleur.
Si j’en crois la Une du quotidien L’Équipe, toujours prompt au dithyrambe pour aguicher le lecteur, l’étape fut marquée par de « terribles engagements » entre les favoris, notamment une échappée de Louison Bobet et de l’Italien Astrua.
Il est vrai que depuis le départ de Strasbourg, la course est débridée. En ce temps-là, les coureurs n’attendaient pas l’ouverture de l’antenne à la télévision pour venir montrer en gros plan le sponsor de leur marque.
L’échappée décisive s’est constituée à 45 kilomètres de Dieppe à l’initiative du Tricolore Nello Lauredi et du régional de l’équipe de l’Ouest Amand Audaire qui, contrairement au héros de la chanson de Pierre Vassiliu « Y n’avait pas de papa », en avait bien un qui oublia un r lors de l’enregistrement à l’état-civil. Ils sont vite rejoints par le méditerranéen Joseph Mirando et l’inévitable hollandais de service Gerrit Voorting.
Au sprint, sur l’esplanade du front de mer, Voorting s’avère le plus rapide offrant à la dynamique équipe de Hollande son premier succès d’étape. Le Suisse Schaer conserve son maillot jaune.
Mardi 7 juillet, le Nord-Africain Kebaïli, opéré d’urgence dans la nuit de l’appendicite, ne prend pas le départ de la 5ème étape qui, de Dieppe à Caen, traverse la Normandie qui m’a donné le jour.
Comme chaque jour, la course est débridée et dès le départ, le Breton Malléjac et le Normand Bultel (l’air du pays ?) attaquent. Feu de paille !
Après quelques escarmouches matinales, les choses sérieuses commencent réellement vers Rouen, ainsi l’Alsacien Hassenforder lance une échappée avec le Tricolore Nello Lauredi sur le circuit automobile des Essarts où, la semaine précédente, le pilote italien Guiseppe Farina de la Scuderia Ferrari a remporté le Grand Prix.
De l’arrière, viennent en renfort le Belge De Bruyne et le « Nord-Est-Centre » Roger Walkowiak. Dans la côte d’Amfreville (km 85), sous l’impulsion de Koblet, un groupe se forme avec notamment Robic, Astrua, le maillot jaune Schaer et Bobet. Trop de beau monde, la présence de favoris à l’avant provoque un regroupement général sur le plateau du Neubourg.
Trois kilomètres plus loin, Hassenforder remet ça. Cette fois-ci, il emmène encore son coéquipier Walkowiak et De Bruyne, ainsi que 3 Bretons de l’équipe de l’Ouest, Jean Malléjac, Émile Guérinel, Joseph Morvan, le Parisien Maurice Diot et le « Sud-Est » Molinéris surnommé Maigre Pierre. L’écart se creuse pour atteindre 10 minutes et 13 secondes à Saint-Laurent-du-Mont (km 165). Cette fois, c’est le bon coup.
En vue de Caen, Malléjac se sort les tripes et remporte l’étape sur le circuit de la Prairie avec 13 secondes d’avance sur ses compagnons d’échappée. Le peloton accuse un retard de 9 minutes et 43 secondes.
Pointé au départ à 9 minutes et 12 secondes du leader, Hassenforder, qui rafle au passage les trente secondes de bonification attribuées au deuxième de l’étape, dépouille Fritz Schaer de sa tunique jaune.
Maurice Vidal, dans son bloc-notes, brosse son portrait : « Avoir sur les épaules le maillot jaune du Tour de France, alors que quelques suiveurs et des millions de sportifs ont encore du mal à prononcer son nom, voilà ce qu’a réalisé Roger Hassenforder. Alors, comme il a connu la gloire trop vite pour qu’elle puisse le suivre et s’habituer à lui, on l’appelle « Hassen »…
Voilà le bonhomme : un culot du tonnerre fait de confiance en soi et d’une inconscience enfantine. Ne croyez pas que ça l’épate d’avoir ce maillot jaune dont rêvent tous les coureurs. Non, non. Il était parti pour cela. Il avait abandonné pour ça le « Dauphiné ». Il en est heureux, tout simplement, et quand il est heureux, ça fait autant de bruit que lorsqu’il est en colère. À Caen, la malheureuse miss chargée de lui remettre le bouquet était effarée de la fougue de ce joli diable qui la couvrait de baisers, l’obligeant à en donner autant à son coéquipier Walkowiak…
… Depuis Strasbourg, il poursuivait un but unique : mettre tout le monde derrière lui, je dis bien tout le monde, car il ne connaît ni grands ni petits, ni forts ni faibles. Pour lui, tous les coureurs ont une bicyclette et deux jambes pour l’actionner, donc il a actionné les siennes toujours à fond, tous les jours à l’attaque. Depuis longtemps sans doute, le cyclisme français n’a pas connu d’attaquants aussi fougueux, possédant autant de moyens physiques. Souvent rejoint, il repartait toujours. Les photographes l’adorent car il leur fournit une matière incomparable et inépuisable. Voulez-vous une grimace, un sourire, un geste ? Voulez-vous qu’il fasse les pieds au mur ? Voilà, tout de suite…
Et ça barde ! Depuis six jours, les « Six jours » de Roger Hassenforder. Alsacien d’origine, 23 ans, toutes ses dents, une figure à la Robert Lamoureux, une fantaisie à la Brûlé, une classe à la Van Steenbergen. S’il n’existait pas, il faudrait l’inventer.
Il ne sait pas ce qui arrivera demain. On peut tout attendre de lui y compris de le voir un jour abandonner si ça ne l’amuse plus … »
Félix Lévitan ne manque pas non plus d’évoquer l’olibrius dans sa correspondance imaginaire avec Henri Desgrange :
« Ah si vous connaissiez Roger Hassenforder. Il a un corps d’athlète une tête toute ronde, auréolée de cheveux fous, des yeux étonnants, vifs, amusés, un sourire spontané, et un vocabulaire à faire frémir. Il n’empêche qu’il est jovial, souvent bon enfant, et que l’humeur la plus joyeuse règne grâce à lui au sein de l’équipe du Nord –Est-Centre dirigée par Sauveur Ducazeaux, un de votre époque, aussi bedonnant aujourd’hui qu’il avait la taille mince et délié à ses 20 ans.
-Laissez-moi vous parler d’Hassenforder. Il est mulhousien, de son pays natal, il a gardé un fort accent, cela vous rajeunit rien que d’y songer, n’est-ce pas ? Oui, Joseph Muller, le Strasbourgeois, mais ce brave Muller que nous avons retrouvé à Strasbourg, où il était l’invité des organisateurs, n’était qu’un tâcheron comparé à Hassenforder. Celui-là, c’est la classe à l’état pur. C’est Crupelandt, c’est Charpentier. C’est l’homme qui monte. Que dis-je ? qui explose … Il est d’une vigueur à faire frémir. Un signe : Antonin Magne en a peur…
Si je dis qu’Antonin en a peur, c’est parce que, devenu directeur sportif, le « père » Tonin l’a embauché. La rumeur prétend qu’Hassenforder écoute les conseils mais n’en fait qu’à sa tête. Il a déjà, toujours selon la rumeur, brandi une pompe menaçante sous le nez d’Antonin tout pantois. Hassenforder en a ri aux larmes. IL prend plaisir à raconter l’anecdote. Celle-là, c’est une entre mille. Il parle autant qu’il pédale. Un moulin à paroles. Et il souligne ses chutes, narre ses ennuis, exalte ses espérances …
Hassenforder vous eût plu, je vous le répète… Donc Hassenforder Ier est une forte nature. Un monsieur qui avale les kilomètres en tête du peloton, le nez dans le guidon, les bras écartés, sans jamais se retourner. Bien sûr cela frise parfois la catastrophe. La pompe… Pas celle d’Antonin, l’autre, celle qui nait de la fatigue, de la fringale, du froid, de la pluie, que sais-je ? Celle qui s’accompagne généralement de la visite de l’homme au marteau. Il broie les pédales, s’insulte, et pousse, pousse, jusqu’à la ligne, ou jusqu’à l’épuisement.
De Dieppe à Caen, il nous a fait la farce avec une poignée de compagnons résolus, de ravir le maillot jaune au Suisse Schaer. Jean qui rit et Jean qui pleure à l’arrivée … Si vous aviez vu le contraste, Hassenforder déchaîné et l’autre mécontent. Le premier clamant sa joie et le second hurlant sa colère. Il paraît même que cela a bardé chez les Suisses. Schaer a joué les pères outragés : « Me faire ça, à moi… » Hugo Koblet a dû l’apaiser : « Tu n’imagines tout de même pas que nous allions nous vider pour te conserver coûte que coûte ton maillot. Non, mon ami, non ce n’est pas l’immédiat qui compte, c’est l’avenir… »
Hassenforder s’en moque bien de l’avenir. Il vit intensément la minute qui passe. La vie est si belle… Maillot jaune à son premier Tour de France ! Quelle merveilleuse histoire …
Je vous tiendrai au courant, Patron. Dès demain, dès que nous serons arrivés au Mans. N’est-ce pas que l’histoire vaut d’être contée, de ce fils d’Hansi appelé à révolutionner sa patrie. »
Étape Caen-Le Mans, 206 kilomètres, après les tripes, les rillettes, tout est bon dans le cochon et le Tour 1953. Jacques Goddet consacre son éditorial : « Aux petits qui n’ont plus peur des grands ».
À Argentan (km 55), le maillot jaune, l’intenable Hassenforder, le Belge Close et le vainqueur de Dieppe Voorting se propulsent à l’avant. Accompagné d’un autre Hollandais Van Breenen, le bel Hugo Koblet, peut-être inspiré par les paysages de la Suisse normande, rejoint les trois fuyards. Un passage à niveau fermé (les trains passaient trop à l’heure en ce temps-là !) scinde le peloton en plusieurs paquets.
L’alerte est sérieuse avec la présence de Koblet à l’avant, tout rentre dans l’ordre à l’approche d’Alençon.
Allez, un petit coup de gnôle locale ! J’exagère à peine, Antonin Magne, dit pourtant Tonin le Sage, vainqueur des Tours de France 1931 et 1934, vantait bien les mérites d’une liqueur, qualifiée de « goudron hygiénique », pour justifier sa réussite sportive.
À la sortie de la cité réputée pour sa dentelle, Louis Caput et François Mahé tentent la fugue. Ils sont bientôt rejoints par le Tricolore Adolphe Deledda, l’Azuréen d’origine grecque Lucien Lazaridès, le Lorrain Gilbert Bauvin, Amand Audaire, le Batave Van Breenen et le Flahute Martin Van Geneugden. L’avance de ces huit hommes atteint les 3 minutes à Mamers, mais ils n’ont pas le temps de goûter aux délicieuses rillettes locales.
Sur le célèbre circuit automobile qui vient de célébrer, cette année, son centenaire, le jeune Belge Van Geneugden ruine les espoirs d’une nouvelle victoire française, en débordant Caput et Deledda. Le peloton termine à un peu plus de 4 minutes.
Roger Hassenforder conserve le maillot jaune. Mieux encore, son équipe est en tête au classement par équipes et place quatre coureurs dans les dix premiers du classement général : outre Hassen, Gilbert Bauvin 6ème, Georges Meunier 7ème, et Ugo Anzile 10ème. J’aimais le maillot orange et bande blanche de cette équipe du Nord-Est-Centre, je ne saurais vous dire pourquoi, comme dit l’autre, les goûts et les couleurs…
Jeudi 9 juillet, cap vers Nantes via La Flèche et Angers, 181 kilomètres. Peu après le départ, un motocycliste provoque une chute collective qui jette une vingtaine d’hommes à terre. Sabbadini et Guérinel, les plus touchés, abandonneront.
Dès le km 31, six coureurs s’échappent : le Tricolore Raoul Rémy, le Parisien Maurice Quentin, les inévitables « Nord-Est-Centre » de service, le Picard Bernard Quennehen et Jacques Labertonnière, le « Sud-Est » René Rotta et l’Italien Livio Isotti. Ils ne seront jamais rejoints. On peut espérer une victoire française sur la piste du vélodrome de Nantes, mais Isotti déborde tout le monde dans le dernier virage et offre à l’Italie sa première victoire d’étape. Hassenforder, tranquille pour une fois, conserve son maillot jaune. Dans le peloton, le sprint est ardemment disputé par les prétendants au maillot vert Belle Jardinière dont Fritz Schaer reste le détenteur.
La 8ème étape, la plus longue du Tour, mène les coureurs de Nantes à Montaigu la digue, la digue … pardon, je m’emporte, de Nantes à Bordeaux, 345 kilomètres, vous lisez bien ! Une étape-souvenir destinée à établir un lien de tradition entre les Tours de grand-papa et celui-ci.
Le départ est donné à 5 heures du matin. La signature et le ravitaillement ont lieu de 4 heures à 4 heures 35 place la République. La caravane publicitaire commence à passer une heure et demie avant les coureurs. Les organisateurs prudents ont prévu un itinéraire avec les horaires probables, calculé sur une moyenne de 30 km/h. Par contre, ils n’avaient pas envisagé un fort vent favorable qui expliquera l’heure et demie en avance au vélodrome Lescure.
Les filles de La Rochelle, qui « ont la cuisse légère et la fesse à l’avenant » (décidément, je suis d’humeur coquine), voient passer un peloton qui a adopté une allure de cyclotouriste.
Rien de sérieux ne se passe avant le contrôle de ravitaillement de Rochefort (sans les demoiselles !). Pour tromper la monotonie, Robic plaisante en servant d’entraîneur au stayer Hugo Koblet.
La course se durcit juste avant Montendre (km 271) lorsque cinq coureurs prennent le large : le Hollandais Jan Nolten, le Belge Robert Vanderstockt, le Luxembourgeois Marcel Dierkens, et les « régionaux » Roger Walkowiak et Bernard Bultel.
Peu avant le pont de Saint-André-de-Cubzac (photographie obligatoire), Nolten fausse compagnie aux quatre autres échappés et s’impose avec panache en solitaire à Bordeaux, inaugurant une tradition de victoires néerlandaises sur la piste girondine.
Le peloton arrive avec près de 6 minutes de retard donnant lieu à un sprint mouvementé entre Magni, Koblet, Robic et Schaer. Hassenforder reste maillot jaune et Schaer garde son maillot vert.
Samedi 11 juillet, c’est jour de repos à Bordeaux. Le journaliste, et ancien athlète, Marcel Hansenne se lamente, avec humour, de ne plus pouvoir faire la sieste : « La grande leçon des premières étapes est très déprimante, les coureurs ne pensent qu’à une chose : courir. J’avoue envier les anciens lorsqu’ils nous content avec une richesse de détails toujours renouvelée les facéties auxquelles se livraient jadis les géants de la route. C’était l’époque où une grande intimité s’établissait dans la caravane. Les suiveurs étaient cordialement invités à profiter des heures creuses. Quand ils ne plaisantaient pas avec les coureurs, ils fuyaient dare dare vers quelque auberge soigneusement repérée, la veille, dans un guide gastronomique et où ils étaient certains de pouvoir déguster des spécialités régionales.
Jadis, le palais avait sa part dans le Tour de France et les étapes étaient à double signification, dans la mémoire des suiveurs. Bordeaux, c’était la victoire de Leducq et le souvenir d’une platée de cèpes ou d’un coq au vin. Aujourd’hui tout est changé. Dès que le signal du départ a été donné, les concurrents empoignent le guidon par le bas et s’en vont jusqu’à l’arrivée, sans désemparer.
Sans aller jusqu’à regretter trop amèrement ces festivités gastronomiques, victimes innocentes de l’accélération de la course, on peut évoquer avec mélancolie ces accalmies d’antan que nous appellerons les moments de complicité.
Aujourd’hui, il n’en reste plus rien non plus. La caravane ne s’accorde plus de vacances. Le mystérieux signal, qui faisait enfouir les carnets dans les poches, ne résonne plus. Les étapes sont devenues trop courtes pour justifier les récréations (il exagère un peu le Marcel d’écrire cela après une étape de 345 kilomètres, ndlr). Naguère, on cheminait huit à dix heures sur la route, et l’idée venait tout naturellement de signer d’éphémères armistices. Les motards en profitaient pour dormir un quart d’heure sur le bas-côté après avoir choisi un coin d’ombre à leur convenance.
Avec l’accélération des moyennes, tout cela a disparu. Les moments sont devenus rares où il ne se passe strictement rien. Affolé, l’ardoisier effectue d’incessantes échappées à l’avant pour noter les dossards et l’avance des fuyards. Les accalmies sont rares et brèves. Le bruit de la sirène et le vrombissement des moteurs rappellent à l’ordre le suiveur enclin à s’accorder quelques instants de répit. Un coup d’œil au compteur de la voiture le renseigne aussitôt sur l’importance de la nouvelle offensive. Si l’aiguille passe du 35 au 50, c’est que les « gros bras » sont mêlés à l’affaire. Alors, toute la caravane s’émeut, s’agite. Les avertisseurs donnent à plein, tandis qu’au loin on entend les coups de sifflets des policiers de la route qui poussent les voitures postées à l’avant-garde de la course. C’est sans surprise qu’on lit sur l’ardoise que le n°15 (Koblet), le n°61 (Bobet) ; le n° (Robic, le n°3 (Bartali) sont engagés dans l’action. Ç n’ira pas loin. Ils sont trop occupés à se surveiller tous. Rien ne se produira de décisif avant la montagne … » Elle se profile.
En effet, dimanche 12 juillet, c’est l’ultime étape avant l’attaque des Pyrénées. Elle mène les coureurs de Bordeaux à Pau avec la fréquemment ennuyeuse traversée de la forêt landaise. Marcel Hansenne aura peut-être le temps de goûter aux spécialités locales, le peloton passe à proximité de l’accueillante auberge du « Père » Darroze à Villeneuve-de-Marsan.
La météo est exécrable : des averses pour commencer, le déluge pour finir. L’allure est cependant vive avec de multiples escarmouches parmi lesquelles on note la présence d’un gars du coin, le jeune André Darrigade***, le futur « lévrier landais ».
Pas le temps de regarder gambader les poulets dans la campagne de Chalosse, la course se joue dans une bosse à la sortie de Saint-Sever. Une trentaine de coureurs se détachent parmi lesquels on relève les favoris Koblet, Bartali, Bobet, Astrua, Robic, Geminiani, mais aussi le maillot vert Schaer. Un, par contre, qui va y laisser des plumes, c’est le maillot jaune Hassenforder, pris de coliques. Il est attendu par ses coéquipiers Labertonnière et le Picard Bernard Quennehen.
Mon père, tout Picard qu’il était, outre qu’il fut évidemment un bon apôtre, était fier qu’un gars de sa région natale soit en première page du Miroir des Sports au secours du maillot jaune. Nous le voyions assez souvent participer aux courses régionales dans la Somme bien qu’il courût sous les belles couleurs grise et orange du prestigieux club parisien de l’A.C.B.B (Athletic Club de Boulogne-Billancourt).
Malgré de multiples attaques en vue de Pau, c’est un groupe de 29 coureurs qui se présente dans la cité d’Henri IV. Sprint royal, c’est de circonstance : un vert-blanc-rouge pas très galant, l’Italien Fiorenzo Magni l’emporte devant Koblet, Robic, Schaer et Bartali !
Le Suisse Fritz Schaer consolide son maillot vert mais surtout retrouve la tunique jaune, Roger Hassenforder terminant à près de 7 minutes. Félix Lévitan se lamente sur le sort de l’Alsacien : » Hassenforder n’est plus porteur du maillot jaune. Il a perdu pied sur la route de Pau, au sortir des Landes. Cela s’est fait d’une façon pitoyable et qui vous eut fait frémir : Hassenforder a été lâché au train, tout seul, en queue de peloton. Il était malade, il est vrai, troubles intestinaux, et il a été si mal soigné que son état, au lieu de s’améliorer, a empiré. La scène a eu des côtés douloureux. Cette bonne brute pleine de vaillance, deux jours auparavant, n’était qu’une loque. Ses yeux rieurs avaient perd leur éclat; ses joues s’étaient creusées et son nez pincé; il ne supportait pas sa casquette sur son front fiévreux, et le ciel par là-dessus pleurait sa misère... »
Le journaliste René de Latour consacre un long article à l’infortuné Hassen, coureur attachant :
« Moi je crois qu’il est fou…
– Lui fou ? Mais pas du tout. Il est plus malin à lui seul que tous les routiers du Tour réunis.
– Avouez, quand même, que par moments …
– Pensez-vous, c’est un genre qu’il se donne !
Voilà quelle tournure prend généralement la conversation des suiveurs du Tour, dès qu’ils abordent le sujet Hassenforder. Et personne n’est d’accord.
Une certitude pourtant : cet homme qui a connu presque en même temps l’ivresse de la gloire et l’amertume de la défaillance, est attachant par mille et un côtés…
Quel âge a-t-il ? Vingt-trois ans sur son passeport. En fait, il doit se trouver quelque part, dans les rouages de son cerveau un infime petit pignon bloqué et qui fait qu’il accorde autant d’importance aux détails futiles qu’aux choses essentielles. Par moments, c’est un gosse de douze ans qui parle. Pour un peu, on s’attendrait à le voir sortir de sa poche des billes et du roudoudou.
À quoi ressemble-t-il avec son visage en pointe, ses yeux goguenards, sa bouche trop souvent tordue pour mimer un rôle et ses mèches rebelles. Si sa gouaille n’avait pas un indélébile accent des « pords te la Mosselle », il serait le portrait même du fantaisiste Robert Lamoureux (les plus âgés d’entre vous se souviennent sans doute de son sketch du canard toujours vivant ndlr). Comme le fameux amuseur, il a le don des réparties qui font s’esclaffer l’auditoire.
Non, l’homme n’est pas fou. Il s’en faut. Fantasque, sans plus, et forçant un peu la dose parfois, par gentillesse, parce qu’il sait fort bien qu’il amuse son monde… »
Et l’intarissable Hassen de raconter moult anecdotes de l’enfant terrible qu’il avait été :
« Certains de ses tours faillirent causer sa perte.
-En octobre 1944, tandis que les Allemands reculaient en Alsace, la campagne était pleine de cadavres d’hommes et d’animaux, et nous vivions, nous les gosses, des aventures extraordinaires. Il suffisait de se baisser pour trouver des armes et des munitions. Je m’étais approprié un révolver d’ordonnance et je me vois encore enfonçant, à coups de marteau, dans le barillet, une balle un peu rouillée. J’avais beau tirer sur la gâchette, l’arme ne fonctionnait pas, jusqu’au jour où une balle m’a traversé la main gauche et est venue se loger derrière mon poignet…
-Mais ça n’est rien. Vous ne connaissez pas l’histoire de la casemate.
Il en rit encore en évoquant ce qui fut en réalité un drame qui rappelle de manière frappante une puissante nouvelle d’Hervé Bazin : « Jeux de mains ». Du moment qu’il n’en est pas mort, pourquoi ne pas considérer cela comme un souvenir amusant.
-Après le départ des Allemands, il y avait dans la campagne, autour de Mulhouse, des munitions en quantité. Grenades, bombes à ailettes, mines anti-chars, obus de tous calibres. Nous avions déniché une casemate abandonnée et avions décidé, mes camarades et moi, d’y amasser tout ce que nous pouvions trouver comme explosifs et d’y mettre le feu, pour supprimer le danger qu’ils représentaient.
Nous avions amoncelé pendant plusieurs jours, sans prendre de précautions, de quoi faire sauter une ville. Pour allumer le tout, j’avais une idée que j’imaginais géniale. J’avais déniché deux cents litres d’essence et avec un pulvérisateur à sulfater les vignes, nous en avions aspergé les murs de la casemate. Une vraie folie.
Comme je m’étais nommé chef artificier, j’avais disposé un cordon imbibé d’essence qui devait mettre le feu au tout. Je m’étais reculé… à cinq mètres.
Il n’a pas oublié le moindre détail de l’histoire, et pour cause, elle lui valut six mois d’hôpital et de souffrances effroyables… »
Sacré Hassen, peut-on oser dire que tout cela le prédestinait à devenir un franc-tireur à vélo ?
« C’est seulement en 1950, à Reims où il vint faire son service militaire, qu’on commença à le prendre au sérieux. Et pour cause : sur la piste du vélodrome où il s’entraînait assidûment, il commençait à jongler avec les meilleurs régionaux, et parfois avec des visiteurs plus aguerris. Coppi lui-même ne s’y trompa pas et le remarqua : « C’est un garçon doué, mais cela ne suffit pas ».
Malgré les victoires régionales qui fourmillent dans son début de carrière, il trouvait toujours moyen de faire douter de lui par une excentricité quelconque.
Il ne compte plus les fois où, s’échappant grâce à son extraordinaire vitalité (disons sa classe), il s’en fut se cacher dans un champ, laissant le peloton courir vainement après lui, tandis qu’en dernière position, il riait sous cape…
… Il n’a pas d’ennemis dans le peloton. Pourquoi se méfierait-on vraiment d’un homme qui est bien trop drôle pour être dangereux ? Ne doit-il pas s’écrouler dès les premiers cols ? N’a-t-il pas déjà perdu le maillot jaune après avoir été malade à Bordeaux et gravi un calvaire jusqu’à Pau ? N’a-t-il pas provoquer la pitié de ses camarades qui ont vu avec peine ce joyeux drille aux traits émaciés, aux narines pincées, se trainer sur la route sans songer à ses habituelles facéties ? Est-il d’ailleurs si tête folle. Il oublie volontiers ses blagues pour expliquer que s’il a décidé d’aller habiter en plein vignoble champenois, au Mesnil-Oger, c’est parce qu’il a tenu à vivre tout l’hiver en ermite, afin de faire des débuts professionnels remarqués. Ils l’ont été … »
Dans le Miroir des Sports, Claude Tillet fait un bilan des neuf premières étapes :
« Rarement début de Tour de France se révéla si passionnant. Le bilan des neuf étapes ayant précédé la montagne est d’une éloquence rare : pas une journée sans relief, pas une arrivée en peloton compact et des surprises fort heureuses telle que la superbe victoire de Nolten à Bordeaux et l’âpreté de la bataille avant Pau.
De Strasbourg au pied des Pyrénées, en passant par les rues déchaussées du Nord, pas un temps mort, pas une phase décevante, de la bagarre, toujours de la bagarre, encore de la bagarre, et pas même cette sorte d’entracte que les concurrents s’accordèrent si souvent au cours de l’étape précédant l’attaque de la montagne. Celle-ci, vous en doutez bien, n’en sera que plus meurtrière »…
À suivre dans le prochain billet !
Pour relater ces premières étapes du Tour de France 1953, j’ai puisé dans les magazines de ma collection, Miroir-Sprint et Miroir des Sports But&Club. Pour combler certains manques, j’ai fait appel à mon ami Jean-Pierre Le Port que je remercie vivement.
* http://encreviolette.unblog.fr/2022/12/10/balade-post-piemontaise-par-le-col-du-petit-saint-bernard-en-compagnie-notamment-dun-ange-et-dun-petit-ramoneur-3/
** http://encreviolette.unblog.fr/2021/06/22/un-amateur-de-tennis/
*** http://encreviolette.unblog.fr/2020/12/01/andre-darrigade-un-coureur-de-legende-par-christian-laborde/