Le pont de Bir Hakeim entre rires et larmes (les ponts de Paris 3)

Il y a quelques jours, pour profiter des premiers rayons du soleil printanier, plutôt que bronzer idiot à la terrasse d’un café, il m’a suffi de passer le pont de Bir Hakeim qui relie la rive gauche de la Seine et le XVème arrondissement au quartier de Passy et au XVIème arrondissement sur la rive droite : une promenade de trois cents mètres entre rires et larmes, entre fête et horreur.
Point de départ de ma balade, je me retrouve dans l’effervescence de la station aérienne Bir Hakeim du métro, à l’angle des boulevard et quai de Grenelle. Elle s’appelait d’ailleurs Grenelle lorsqu’elle s’ouvrit le 24 avril 1906. La proximité de la Tour Eiffel explique sa forte fréquentation par les touristes. Comme lors de chacune de mes visites, je jette un œil sur la rue Nélaton adjacente :

« Pour y aller vous prenez le métro
Vous foncez dans le populo
Y’a tout là-d’dans
Des mécanos, des employés, des aristos
Des petites poules parfois qui sont belles
Tout ça ça descend à Grenelle
Vous avancez et vous lisez
Sur le fronton rue Nelaton
Et au-dessus en lettres vives
Vélodrome d’Hiver
Oh mon Vel ‘ d’Hiv’ !… »

C’est là en effet que, après avoir investi temporairement l’ancienne Galerie des Machines de l’exposition universelle de 1889 à proximité du Champ de Mars, fut érigé en 1909 le vélodrome d’hiver de Paris qu’on appela familièrement de l’apocope Vel’ d’Hiv ‘comme le chantèrent Charles Trenet et Yves Montand. Victime de l’appétit des promoteurs immobiliers, il vécut ses dernières heures le 17 avril 1959 à l’occasion d’une réunion au cours de laquelle Fausto Coppi, Louison Bobet, Jacques Anquetil et Charly Gaul disputèrent un super omnium des vainqueurs du Tour de France tandis que Roger Rivière pulvérisait le record de l’heure de la piste.

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Je n’ai vécu l’atmosphère des Six jours cyclistes de Paris qu’une vingtaine d’années plus tard lorsqu’ils ressuscitèrent ou plus justement vivotèrent (pour peu de temps) dans le tout nouveau palais omnisports de Bercy. Cependant, je me souviens dans ma prime enfance des retransmissions sur la télévision familiale en noir et blanc, des dernières éditions disputées au Vel’ d’Hiv’, d’autant que mon idole Jacques Anquetil les remporta en 1957 et 1958 : la grande verrière surplombant la piste de sapin, la populace saucissonnant sur les gradins, le Tout-Paris en smoking et robe du soir dînant au restaurant de luxe sur la pelouse, l’accordéon d’Yvette Horner hurlant dans les hauts-parleurs, Michèle Mercier reine des Six jours avant d’être marquise des anges, les guitounes où les « six-daymen » se reposaient, les chasses et la grande prime du million de francs, le speaker Georges Berretrot … « sur les vingt prochains kilomètres une prime de vingt mille francs offerte par les papiers à cigarette OCB ; vous aimez vous les rouler alors choisissez… OCB reprenait en chœur le public ! ou DOP DOP DOP, adoptez le shampooing DOP » ! J’ai sans doute eu tort de suivre ce dernier conseil !

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C’était une immense fête populaire qui se prolongeait dans les cafés et brasseries aux alentours. Il y a encore peu de temps, subsistaient les enseignes de la Brasserie du Vélodrome et Chez Routis derniers témoignages de cette époque, remplacés aujourd’hui par des appellations plus tendance comme Eiffel Café ! André Routis était un ancien champion du monde de boxe catégorie poids plumes qui se reconvertit donc dans la « limonade ». À son comptoir, se retrouvaient souvent rassemblés coureurs, boxeurs, artistes et … quidams ! Je ne résiste pas à vous livrer une savoureuse histoire contée par Robert Chapatte : les héros en sont Roger Godeau dit Popeye à cause de son excellente imitation du matelot de Walt Disney, et Bernard Bouvard, deux excellents pistards des années 50 ainsi qu’un certain Lombard de moindre notoriété. Ce dernier en mal de succès demanda aux deux autres s’ils ne possédaient pas en valeureux professionnels qu’ils étaient, un « bon produit » ! Malgré leurs dénégations répétées et devant l’insistance de Lombard revenant sans cesse à la charge, c’est le cas de le dire, les deux compères Godeau et Bouvard passèrent le matin de la course chez Routis et dégotèrent dans sa cuisine un morceau de gruyère auquel ils donnèrent la forme d’un suppositoire avant de l’envelopper dans une feuille d’étain. L’après-midi, le pauvre Lombard, un peu immature bien qu’il eût pour surnom Victor Mature, se révéla irrésistible remportant tous les sprints sans exception ! Stupéfiant non ?
Le Vel’ d’Hiv’ connut aussi les grandes heures de la boxe et de grands champions du « noble art » comme Marcel Cerdan, Ray Sugar Robinson, Charles Humez, Robert Cohen, Alphonse Halimi y livrèrent quelques combats homériques.
Quelques mois avant sa destruction, les vieilles structures métalliques faillirent s’écrouler devant un commencement d’émeute : bouteilles, parapluies, morceaux de sièges, armes improvisées voltigèrent sur le ring. Et tout cela parce que le vengeur de l’humanité, le catcheur l’Ange blanc venait de perdre une manche contre l’affreux Bourreau de Béthune ! Heureusement, l’ange apaisa le public en étendant les ailes de sa cape. Il prétendait s’appeler Georges, étudier à l’université San Marco de Lima et fréquenter les musées ; il se nommait en fait Francisco Pino et était auparavant un catcheur de troisième catégorie à l’Élysée-Montmartre. Il possédait une prise célèbre qui endormait son adversaire. La légende dit qu’un spectateur qui lui avait lancé un défi, ne se réveilla qu’à l’infirmerie. L’Ange blanc était si demandé que des clones naquirent et qu’il pouvait combattre le même soir dans trois villes différentes !

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Cet après-midi, tous ces souvenirs sont bien futiles et désuets et, en arpentant la rue Nélaton, mes pensées filent vers une photographie en noir et blanc de quatre autobus stationnant devant l’entrée du Vel’ d’Hiv’. Nous sommes à l’aube du 16 juillet 1942 et les riverains sont réveillés par des ronflements de moteurs, des coups de frein, des bruits de bottes martelant le bitume : « Les 16 et 17 juillets 1942, 13 152 juifs furent arrêtés dans Paris et sa banlieue, déportés et assassinés à Auschwitz. Dans le vélodrome d’hiver qui s’élevait ici, 4115 enfants, 2916 femmes, 1129 hommes furent parqués dans des conditions inhumaines par la police du gouvernement de Vichy sur ordre des occupants nazis. Que ceux qui ont tenté de leur venir en aide soient remerciés. Passant, souviens-toi ! ». Clin d’œil ignominieux de l’Histoire, cette plaque rappelant la plus grande arrestation massive de Juifs en France appelée Rafle du Vel’ d’Hiv’ fut déplacée dans un jardinet voisin lorsque, en lieu et place de l’enceinte sportive, furent construits … les nouveaux bâtiments abritant les services de la Direction de la Sécurité du Territoire (DST) dépendant du ministère de l’Intérieur.
Lors de la commémoration du cinquantième anniversaire de cette tragédie, le président Mitterrand tandis qu’il fleurissait la plaque, fut sérieusement conspué pour son indulgente amitié avec René Bousquet, secrétaire général de la police nationale sous Vichy, et son refus de reconnaître, au nom de la République, les responsabilités françaises dans la rafle. Il désenfla la polémique par le décret du 3 février 1993 qui institua que chaque dimanche le plus proche du 16 juillet serait une « Journée nationale commémorative des persécutions racistes et antisémites commises sous l’autorité de fait dite « Gouvernement de l’Etat français 1940-1944) ». Le même décret prévoyait aussi l’édification d’un monument commémoratif, place des Martyrs juifs du Vélodrome d’hiver vers laquelle je me dirige maintenant. En fait de place guère repérable, il s’agit d’un carrefour automobile au croisement du boulevard et du quai de Grenelle, à l’embranchement du pont de Bir Hakeim.
Le temps de rejoindre le monument à l’extrémité d’une allée plantée d’arbrisseaux, je vous laisse en compagnie de Jean Ferrat. En effet, hasard de l’actualité et du choix de mes sujets, le poète récemment disparu, outre son inoubliable Nuit et brouillard, mit en musique Si nous mourons, une lettre d’Ethel Rosenberg à ses enfants. Ethel et son mari Julius furent les victimes du maccarthisme, cette chasse aux sorcières visant les sympathisants, militants et agents communistes. Juifs new-yorkais communistes, les époux Rosenberg, convaincus d’espionnage au profit de l’URSS, furent arrêtés en 1950 et exécutés sur la chaise électrique à la prison de Sing Sing le 19 juin 1953. Écoutez avec recueillement cette poignante chanson :

https://www.dailymotion.com/video/xs7a1h

Oeuvre du sculpteur Walter Spitzer rescapé des camps et de l’architecte Mario Azagury, la stèle, inaugurée le 17 juillet 1994, représente sur un socle incurvé rappelant la piste du vélodrome, un groupe en bronze de sept civils de tous âges, hagards au milieu de bagages, évoquant l’abandon et le désespoir des déportés. La référence aux ordres de l’occupant nazi a disparu de la nouvelle inscription.

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Quelques mois après son accession à la présidence de la République, Jacques Chirac reconnut devant ce monument la complicité de l’État français dans la persécution des Juifs : « Ces heures noires souillent à jamais notre histoire, et sont une injure à notre passé et à nos traditions. Oui, la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des Français, par l’Etat français. (…) La France, patrie des Lumières et des droits de l’homme, terre d’accueil et d’asile, la France, ce jour-là, accomplissait l’irréparable. Manquant à sa parole, elle livrait ses protégés à leurs bourreaux. »
Je m’écarte devant une classe de lycéens accompagnés de leur professeur. Je tends l’oreille espérant quelques échanges instructifs devant le monument … en vain car ces jeunes indifférents ont tôt fait de tourner les talons, plus préoccupés par leur téléphone portable ! Me revient à l’esprit la phrase d’un écrivain lue la veille : « une chose est sacrée, c’est la mémoire, le contraire de l’oubli qui fait qu’en notre pas si bonne et vieille humanité sommeille toujours le monstre ». Me reviennent en tête les images révoltantes d’un documentaire diffusé l’avant-veille sur la chaîne Histoire avec ces enfants dans leur espèce de pyjama rayé ne comprenant rien de ce qu’il leur arrive derrière les barbelés. Je pense aussi à mon papa qui, dans mon enfance, m’expliqua avec pédagogie l’Holocauste lors de visites aux camps du Struthof dans les Vosges et de Dachau en Bavière. Président du comité du Souvenir Français durant vingt-deux ans, il fréquentait avec ferveur les lieux de mémoire ne se résignant pas à ce que « le sang sèche trop vite en entrant dans l’Histoire ».

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Je me retrouve à l’entrée proprement dite du pont qui fut reconstruit dans sa configuration actuelle en 1905 par l’entreprise de construction métallique Daydé & Pillé réalisatrice également du pont Mirabeau et du Grand Palais. Il comporte deux étages : un pour les piétons et les automobiles et au-dessus un viaduc ferroviaire sur lequel court la ligne 6 du métro.

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Je me place dans la perspective des colonnades métalliques qui supportent la voie ferrée. Bien que déserte, mon inspiration cinéphilique aidant, j’y vois avancer côte à côte Marlon Brando désespéré par le suicide de son épouse et Maria Schneider mutine et craquante avec son Fedora vissé sur ses boucles brunes, son manteau blanc bordé de fourrure et ses bottes hautes. Encore inconnus l’un pour l’autre, ils se dirigent pour visiter le même appartement à louer. Dans quelques minutes, ils feront connaissance, prélude à une relation passionnelle qui comptera … pour du beurre, allusion à la scène sulfureuse du film Dernier tango à Paris que certaines mauvaises langues surnommèrent « Dernier Brando à Paris » pour brocarder l’acteur vieillissant.

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Le pont est constitué de deux ouvrages métalliques inégaux comportant chacun trois travées du type « cantilever » (poutres en porte-à-faux), séparés par un ouvrage monumental en maçonnerie implanté sur la pointe amont de l’île des Cygnes. C’est vers ce dernier que je me dirige le nez souvent en l’air pour apprécier le style kitsch du fatras des ferrailles et des lampadaires anciens.

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Au fronton de l’harmonieuse arche de pierre, chapeautée du blason avec le vaisseau et les fleurs de lys de la ville de Paris, une inscription rappelle le nom d’origine du pont, le viaduc de Passy. Il a été rebaptisé en 1949 en souvenir de la bataille de Bir Hakeim livrée par les Forces Françaises Libres durant la seconde guerre mondiale. C’est près de ce point d’eau désaffecté au milieu du désert de Libye qu’entre le 26 mai et le 11 juin 1942, la première brigade française libre commandée par le général Koenig résista farouchement aux armées italiennes et allemandes de l’Afrika Korps du général Rommel, permettant ainsi aux troupes britanniques en difficulté de se replier avant de triompher bientôt à El Alamein. Les experts en stratégie militaire disent parfois que Bir Hakeim est le grain de sable du désert qui enraya la progression de la machine de guerre allemande. Un taxi pour Tobrouk, le beau film interprété magistralement par Lino Ventura, Charles Aznavour et Maurice Biraud, raconte une fiction contemporaine de ces assauts.
Quatre imposantes statues en haut-relief ornent les écoinçons de l’édifice. Œuvres de Jean-Antonin Injalbert, les deux en aval du fleuve symbolisent l’Électricité et le Commerce. Sur la face amont, Jules Coutan a sculpté la Science et le Travail. Des quatre allégories, seul le Commerce est représenté par un homme, les femmes offrant leur grâce aux trois autres, l’une d’elles étant même complètement dénudée ce qui est dangereux quand il s’agit d’Électricité !

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Sur la clef de voûte apparaît un caducée. Celui-ci, constitué d’une baguette entourée de deux serpents entrelacés et surmonté de deux ailes, est un attribut du dieu Mercure, figure mythologique protectrice des voyageurs et des commerçants.
Je passe sous l’arc de triomphe et, après m’être assuré que ne débouche aucune voiture filant vers la rive droite, j’accède à une charmante placette demi-circulaire en décrochement du pont au milieu de laquelle trône La France renaissante, une statue équestre œuvre du sculpteur danois Holger Wederkinch, signifiant une figure renouvelée de Jeanne d’Arc. L’endroit est propice pour profiter du soleil en poupe sur la Seine avec en prime, l’un des plus magnifiques points de vue de la capitale sur la tour Eiffel.

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Sabre au clair, maîtrisant tant bien que mal sa monture, la Jeanne rajeunie tourne le dos à la réplique en bronze de la statue de la Liberté qui brandit son flambeau sur le pont suivant en aval et que l’on peut gagner en empruntant l’allée arborée de l’île aux Cygnes, ancienne digue de Grenelle.

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Des bords tranquilles de l’île, je contemple l’ornementation statuaire des piles réalisée en 1906 par le sculpteur et médailleur Gustave Michel. On y reconnaît d’une part les Nautes (corporation regroupant les professionnels de la navigation) équipés d’accessoires maritimes tels filet, amarre, bouée et voile, attachant à la pile un blason aux armoiries de la ville de Paris, et d’autre part, les forgerons-riveteurs fixant un blason de la République Française. Ces deux motifs sont reproduits à l’identique sur les deux bras de la Seine, en amont et en aval, soit donc quatre fois chacun.

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Des pigeons s’aiment d’amour tendre dans les entrelacements de l’architecture métallique finement décorés aussi de mascarons de lions et de coquilles saint Jacques.
Je reprends ma déambulation. Au-dessus de moi, ce n’est pas tous les jours grève à la RATP, gronde le va-et-vient incessant de la rame de métro. Je guette l’instant où Jean-Paul Belmondo surgira courant sur le toit d’un des wagons, remake de la séquence de Peur sur la ville qui fut tournée en ces lieux. Je n’ignore évidemment pas que Bebel ne possède plus son agilité d’antan mais c’est l’occasion de saluer l’immense acteur d’À bout de souffle et Pierrot le fou de Godard, de Léon Morin prêtre, de L’Aîné des Ferchaux, d’Un singe en hiver, du Doulos de Melville, qui eut le tort à mon goût de se perdre ensuite dans ses cascades à répétition. La légende dit que lors du tournage de cette séquence, à un badaud qui l’interpellait : « Bravo Bebel, même pour cent briques, je ne l’aurais pas fait », Belmondo lui répondit : Moi non plus ! »

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J’atteins bientôt la rive droite en surplomb de l’avenue du président Kennedy. Quant au viaduc ferroviaire, avant de pénétrer dans la colline de Chaillot, il poursuit sa course à hauteur du second étage des immeubles haussmanniens dotés d’étranges poivrières d’angle en ardoise dans la rue de l’Alboni du nom d’une cantatrice italienne du dix-neuvième siècle. Léon Dauvergne est à l’origine de cette architecture conçue pour magnifier le paysage urbain à l’occasion de l’exposition universelle de 1900.

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Pour rejoindre la rive gauche, j’ai le choix entre emprunter le métropolitain ou retourner à pied en m’imaginant un instant en doublure lumière de Leonardo Di Caprio qui a tourné il y a peu en compagnie de Marion Cotillard quelques scènes sous le viaduc pour Inception, le prochain film de Christopher Nolan qui sortira en juillet … C’est parti en métro pour trente secondes de rêve, suspendu au-dessus du fleuve, presque à hauteur d’épaules de cette chère madame Eiffel bien plus accueillante qu’une certaine dame de fer britannique vilipendée par la chanteur Renaud.

« … Miracle sans nom à la station Javel
On voit le métro qui sort de son tunnel
Grisé de ciel bleu de chansons et de fleurs
Il court vers le bois, il court à toute vapeur
Y a d’la joie
La tour Eiffel part en balade
Comme une folle elle saute la Seine à pieds joints
Puis elle dit:
 » Tant pis pour moi si j’suis malade
J’m'ennuyais toute seule dans mon coin »
Y a d’la joie … »

Ce n‘est pas l’Alboni qui vocalise mais encore Trenet qui, par licence poétique, a préféré Javel à la station Passy qui offre la particularité d’être souterraine à son extrémité ouest et aérienne à l’autre bout.
À la descente à la station Bir Hakeim Tour Eiffel, le « fou chantant » serait ravi de constater que le soleil a enfin rendez-vous avec la lune. En effet, en 2008, l’artiste d’origine brésilienne Judy Edgerwood a déposé à sa façon les deux astres sur les pignons des verrières.
Sur le mur en faïence du quai, une fresque évoquant la grande rafle du Vel’ d’Hiv’ me ramène à la tragique réalité de l’Histoire.

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Des larmes aux rires, de la honte à la fête, en bas de l’escalator, sur le boulevard de Grenelle, je jette un dernier regard vers la rue Nélaton :

« …Vel’d’Hiv’
Quand je n’avais pas de sucettes pour toi
Que je resquillais comme il se doit
Quand le contrôleur ne regardait pas
Vel’d’Hiv’
Perdu tout là-haut dans les hauteurs
J’entendais les hauts-parleurs
Hurler attention demi-fond sur une heure
Au départ messieurs les coureurs… »

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Publié dans : Ma Douce France |le 1 avril, 2010 |2 Commentaires »

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2 Commentaires Commenter.

  1. le 9 avril, 2010 à 12:19 JPP écrit:

    Merveilleuse évocation d’une époque révolue, où se mêlent sensibilité , tendresse et humour.Ce style plein de finesse et de références cinématographiques permet de faire revivre les drames et les joies passées sans heurter.Les respirations sonores ajoutent une touche supplémentaire d’authenticité à ce récit passionnant.Ce message modeste se veut surtout encouragements et félicitations.

    Répondre

  2. le 23 décembre, 2013 à 16:21 Régis écrit:

    Entre rires et larmes, vous ne pouvez mieux dire. 24 octobre 1981, vers 23h, désespéré après une rupture amoureuse, j’ai enjambé le parapet du pont de Bir Hakeim, avec l’intention d’en finir. Je me suis retrouvé dos au pont sur l’étroite corniche de fer qui surplombe la Seine. Mes jambes tremblaient, le vent soufflait. C’est ce qui m’a surpris et m’a retenu un instant. Je me croyais seul. Je n’avais pas vu un couple qui se trouvait sur l’autre trottoir de l’autre côté du terre-plein du viaduc. Ils avaient tout vu, eux, et se sont précipités vers moi. Il a fallu toute la persuasion de ces gens et la force physique de l’homme qui m’a finalement agrippé pour refaire passer la rembarde dans l’autre sens pour que je mette fin à mon projet. Ce couple m’a sauvé. Ils m’ont emmené chez eux, ils m’ont réconforté, ils m’ont aidé à me reconstruire. Trente deux ans après, s’ils se reconnaissent, qu’ils acceptent encore mes remerciements les plus sincères. Je leur suis à jamais reconnaissant.

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